Et si demain, maintenant, bientôt, il me venait, il me prenait l’envie de voler, de m’envoler, de courir, de partir, de rougir, de m…. , de sauter ou de plonger. De tout bousculer, de basculer et de tomber peut-être.
Et si maintenant, je décidais de me murer, de rester seule, de réfléchir, de tout redéfinir, de plonger tout au fond du tréfonds pour le pétrir, le triturer, qu’en retirerais-je ? Comme l’alchimiste, la poudre d’or ? Ou de mon poing le malmenant ressortirais-je une boule, une noirceur, un trou noir d’une densité telle qu’il absorbe, en fin de compte, la totalité de son sillage ?
Et si demain je décidais de ne rien faire, de continuer d’enfiler les jours aux nuits, de les regarder encore défiler, se défiler, se démailler, se déliter…
Et pourquoi toujours, il faudrait faire, avancer, un pas toujours un pas, quand la direction est aux quatre points cardinaux, aux quatre vents, nous saigne aux quatre veines… Quand le soleil chaque soir meurt après une courte vie. Quand le soleil ne renaît que pour mourir encore.
Comme si l’homme, la femme, l’être n’étaient que papillons d’un jour, d’une nuit, illusion ou chimère.
Et si les vagues n’étaient ni plus ni moins qu’un legs abordable pour les uns, qu’ils empoigneraient à bras le corps. Et si ces mêmes remous n’étaient qu’estafilades sans choix, sans fil, sans suite pour les autres, une eau mouvante filtrant entre chaque doigt.
Et si demain me donnait des nouvelles de moi, des nouvelles d’hier et d’après-demain. Et si demain, il n’y avait rien qu’un lendemain.
Si le champ des possibles avait si peu de bornes que son étendue n’en soit plus intelligible. Si l'égarement de la grandeur n’avait d’égale que son étroitesse, nous asphyxiant et nous tyrannisant.
Et si demain, aujourd’hui, ce soir peut-être, j’arrêtais juste là, à ce point précis, de penser aux lueurs inaccessibles, si je fermais les yeux sur l’absence des étoiles, laissant au vide du trou noir toute la place qu’il engouffre pour se nourrir…
Pour finir, quel sens prendre, à quelle direction se confier ?
Si je, si nous, celui qui décide, n’était qu’un rêve inventé, perpétuellement réinventé, pour combler un fond si profond que l’on passerait sa vie… à y tomber ?